dimanche 5 février 2012

Lumière et ténèbres

Les jours allongent depuis plus d’un mois.  J’aime le matin ouvrir les rideaux des fenêtres et percevoir les lueurs de l’aurore qui deviennent peu à peu la lumière du jour. Puis le soleil brille, c’est éblouissant de beauté. Quand il y a des nuages, la lumière luit quand même, plus forte que ces ténèbres qui semblent ne pas vouloir quitter nos lieux.

Quand je fais une recherche sur le web, pour le mot « lumière » on me donne plus de 17 millions de références! Pour le mot « ténèbres » je ne trouve qu’environ 8 millions! La lumière est deux fois plus importante que les ténèbres aussi bien dans nos vies personnelles que dans l’histoire du monde! Elle ravigote la vie des plantes et des animaux, elle donne élan et énergie. Elle chasse les ténèbres, met de la joie sur les visages et dans les cœurs.

Mais qu’est-ce que la lumière? Les physiciens la définissent comme l’ensemble des ondes électromagnétiques qui sont visibles par l’œil humain, c’est-à-dire les couleurs entre le violet et le rouge. On parle aussi de la vitesse de la lumière ou encore d’une année-lumière. Mais à travers toutes les cultures, la lumière est devenue un très puissant symbole. Toutes les religions se servent de cette image, en somme fort simple et fort mystérieuse, dans leurs évocations et interprétations du monde, de ses mystères, de son origine et de son devenir.

Et les ténèbres? « Les ténèbres sont d'abord un concept ou une croyance religieuse qui désigne le néant, la mort, l'état de l'âme privée de Dieu, de la grâce, et qui signifie privation totale de lumière, obscurité ». Les ténèbres sont une absence, une privation, une négation de lumière.

Dans la foi judéo-chrétienne, ces deux symboles sont très présents. La Bible commence par ces mots : « Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre. Or la terre était vide et vague, les ténèbres couvraient l'abîme, un vent de Dieu tournoyait sur les eaux. Dieu dit: "Que la lumière soit" et la lumière fut. Dieu vit que la lumière était bonne, et Dieu sépara la lumière et les ténèbres. Dieu appela la lumière "jour" et les ténèbres "nuit." » (Genèse 1,1)

Les Évangiles présentent Jésus, dès son incarnation, comme la lumière qui illumine la foi et rend fécond le corps de Marie sa mère, qui appelle des bergers à la crèche, qui guide des savants étrangers vers l’Enfant. « Au commencement était le Verbe et le Verbe était avec Dieu et le Verbe était Dieu. Il était au commencement avec Dieu. Tout fut par lui, et sans lui rien ne fut. Ce qui fut en lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes, et la lumière luit dans les ténèbres et les ténèbres ne l'ont pas saisie. » (Jean 1, 1-5).

Un vieillard chantera Jésus comme la lumière attendue depuis des siècles par son peuple : « Maintenant, Souverain Maître, tu peux, selon ta parole, laisser ton serviteur s'en aller en paix; car mes yeux ont vu ton salut, que tu as préparé à la face de tous les peuples,  lumière pour éclairer les nations et gloire de ton peuple Israël » (Luc, 2, 29-31). Jésus est l’Astre venu d’en haut « pour illuminer ceux qui demeurent dans les ténèbres et l'ombre de la mort, afin de guider nos pas dans le chemin de la paix ». (Luc 1,79).

Nos Écritures parlent aussi des ténèbres. Dieu Lumière est à l’œuvre depuis les origines de tout. Depuis que les humains existent et s'enfoncent à travers mille chemins et par des choix personnels, sociaux, politiques dans les ténèbres, la lumière n’a pas cessé de briller au sein de ces ténèbres pour offrir sans cesse une ouverture vers l’avenir, une vie neuve.

Jésus notre Lumière est venu dans les ténèbres de notre monde pour les combattre. Cette lutte ne se déroule pas sur le plan physique, mais est d’ordre moral, spirituel, surnaturel. C’est une action qui éclaire les intelligences et réchauffe les cœurs. C’est un apport de vitalité neuve, d’élan vers l’avenir, de confiance, d'ouverture, de paix.

Et nous y sommes engagés comme croyantes et croyants en Jésus. Il nous a dit : « Vous êtes la lumière du monde » (Matthieu, 5, 14). C’est notre identité de personnes baptisées et notre mission. C’est ce que saint Paul explicite à ses jeunes convertis : « Tous vous êtes des fils de la lumière, des fils du jour. Nous ne sommes pas de la nuit, des ténèbres. Alors ne nous endormons pas, comme font les autres, mais restons éveillés et sobres. Ceux qui dorment, dorment la nuit, ceux qui s'enivrent, s'enivrent la nuit. Nous, au contraire, nous qui sommes du jour, soyons sobres; revêtons la cuirasse de la foi et de la charité, avec le casque de l'espérance du salut. Dieu ne nous a pas réservés pour sa colère, mais pour entrer en possession du salut par notre Seigneur Jésus Christ, qui est mort pour nous afin que, éveillés ou endormis, nous vivions unis à lui. C'est pourquoi il faut vous réconforter mutuellement et vous édifier l'un l'autre, comme déjà vous le faites. » (1 Thessaloniciens, 5, 5-11).

C’est en accueillant Jésus qui est la Lumière du monde que nous devenons lumières et que nous rendons notre monde un peu plus lumineux.

† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau